Psychopédagogie positive
Le terme psychopédagogie désigne, à l’origine, un champ d’étude situé à la frontière de la psychologie et de la pédagogie, visant à comprendre les processus d’apprentissage pour mieux adapter l’enseignement aux besoins des élèves.
Dans les années 1950-1970, la psychopédagogie s’est développée dans les écoles normales et les universités de formation des maîtres, avec pour objectif de relier les connaissances issues de la psychologie de l’enfant, de la motivation et de la mémoire à la pratique pédagogique (Terral, 1994).
Cependant, cette discipline est restée instable sur le plan épistémologique et ici l’ajout de l’adjectif « positive » en fait un objet plus marketing que scientifique.
Descriptif
La psychopédagogie positive se présente comme une approche éducative « globale » visant à réconcilier les élèves avec les apprentissages en réconciliant la tête, le cœur et le corps.
Elle prétend combiner les apports de la psychologie positive, des neurosciences, de la gestion mentale et de multiples approches dites “corporelles” ou “alternatives” pour favoriser la réussite scolaire et le bien-être émotionnel.
Derrière ce discours, la psychopédagogie positive se présente comme une véritable “soupe positive” où se côtoient pêle-mêle :
- PNL, hypnose, méthode Vittoz, gestion mentale,
- réflexes archaïques / IMP, Brain Gym, sophrologie,
- méditation de pleine conscience, EFT, kobido et réflexologie plantaire.
Ces pratiques sont toutes empruntées à des courants non validés scientifiquement et souvent classés comme pseudosciences par la communauté scientifique.
Promesses
Selon ses promoteurs, la psychopédagogie positive permettrait de :
- réenchanter les manières d’apprendre et de travailler ;
- redonner du sens à l’apprentissage et à la mission d’enseigner ;
- retrouver la joie d’interagir, la curiosité de découvrir et le pouvoir d’agir sur son environnement ;
- renforcer la motivation, la confiance en soi et la gestion du stress ;
- améliorer la concentration, la mémoire et la créativité ;
- favoriser la coopération et un climat de classe “bienveillant et apaisé”.
La méthode est diffusée via des formations payantes (entre 4 800 € et 6 800 € pour 300 heures) ne nécessitant aucun prérequis et donnant lieu à une “certification” maison intitulée Praticien en psychopédagogie positive.
Le site vendant la formation précise que cette certification n’est pas reconnue par l’État, mais qu’elle permet néanmoins d’ “exercer dès la fin de la formation”…
Les pratiques associées (sophrologie, réflexes archaïques, EFT, méditation, hypnose…) sont présentées comme des “outils complémentaires” d’aide aux apprentissages, sans distinction entre le registre thérapeutique, spirituel ou éducatif.
Origine
Créée en France au début des années 2010, la psychopédagogie positive a d’abord été promue dans le milieu du coaching scolaire avant de s’étendre à la formation des enseignants.
Le dépôt des marques Pédagogie positive puis Praticien en psychopédagogie positive confirme son statut commercial et non académique.
Le site officiel revendique une approche dite “Tête, Cœur, Corps”, censée réconcilier la pensée, l’émotion et le geste, or cette triade est typique des dérives issues du courant new-age, qui valorisent une “harmonisation des plans physique, émotionnel et spirituel” présentée comme une voie de guérison intérieure et d’éveil global.
On retrouve cette structure symbolique dans de nombreuses pratiques ésotériques (chamanisme occidental, kinésiologie, “thérapies quantiques”), où elle exprime une vision unifiée de l’être humain, étrangère à la démarche scientifique et éducative.
Points de vigilance
- Absence de fondement scientifique : la psychopédagogie positive assemble des éléments hétéroclites issus de disciplines non validées (PNL, sophrologie, réflexes archaïques, méditation…).
- Habillage neuroscientifique trompeur : elle utilise un lexique pseudo-scientifique (“cerveau droit/gauche”, “plasticité neuronale”, “cerveau en mode positif”) sans lien avec les travaux de la recherche.
- Formation non reconnue : la certification délivrée par La Fabrique à Bonheurs n’a aucune valeur légale et ne correspond à aucun diplôme enregistré au RNCP.
- Glissement vers le thérapeutique : les exercices proposés (visualisation, respiration, ancrage) relèvent du champ psychologique, non de la pédagogie. Ils peuvent exposer les élèves à des pratiques de type méditatif ou suggestif.
- Risque d’emprise et de dérive commerciale : la Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires) alerte sur ces approches “psychologisantes” conduites par des formateurs auto-proclamés, sans supervision ni contrôle des contenus.
En résumé, la psychopédagogie positive relève moins d’une pédagogie que d’une marque commerciale mêlant coaching, spiritualité douce et pseudosciences.
Sous couvert de bienveillance, elle brouille les frontières entre éducation, thérapie et commerce.
Et si on faisait plutôt…
… de la métacognition, pour aider les élèves à identifier et réguler leurs propres stratégies d’apprentissage,
… des activités coopératives, pour travailler la gestion des émotions et le vivre-ensemble,
… des moments de pause simples et neutres : lecture silencieuse, respiration libre, étirements… sans habillage “énergétique” ni “neuro-positif”.